Interventions en faveur des migrants qui rentrent dans leur pays d’origine

Le retour est l’une des étapes possibles du cycle migratoire.Aux fins du présent rapport, cette étape correspond au voyage qui mène le migrant du pays de destination jusqu’à son pays d’origine, ainsi que la réinstallation dans le pays d’origine. La section qui suit donne une vue d’ensemble des besoins des migrants qui rentrent dans leur pays et présente quatre pratiques intelligentes qui répondent à certains de ces besoins.

Messages clés de la section

BESOINS DES MIGRANTS

  • La présente section est consacrée aux besoins des migrants vulnérables qui rentrent dans leur pays d’origine. Ces besoins sont des besoins à court terme pendant le voyage, et des besoins à long terme à l’arrivée.
  • Avant tout, les migrants ont besoin de sécurité réglementaire : nul ne doit être renvoyé dans un pays en violation du principe de non-refoulement1. Pendant le voyage, les besoins physiques tels qu’un hébergement sûr sont essentiels. À leur retour dans leur pays d’origine, les migrants devraient avoir accès à long terme à un soutien durable visant à pallier la vulnérabilité et les risques auxquels ils faisaient face avant leur départ. Les besoins peuvent inclure les possibilités d’emploi, un capital naturel de bonne qualité, les possibilités d’éducation, etc. Le regroupement avec la famille est souvent extrêmement important dans le pays d’origine, car les proches aideront souvent le migrant rentré au pays en lui fournissant un logement, de la nourriture et d’autres formes de soutien.

PRATIQUES INTELLIGENTES

  • Les pratiques intelligentes recensées pour cette étape visent le capital financier et le capital physique, ainsi que l’éducation.
  • Elles partagent quelques caractéristiques communes : elles visent à fournir des solutions à long terme et à court terme ; elles sont stables et constantes ; elles associent les migrants aux solutions ; elles sont ciblées ; elles sont mises en œuvre en partenariat avec des acteurs présents pour la plupart dans le pays.
  • Pour répondre aux besoins des migrants, les acteurs ont rencontré quelques difficultés, notamment pour suivre et évaluer l’efficacité des services, et pour fournir tous les services nécessaires. Parmi les enseignements tirés, il faut citer l’utilité de collaborer pleinement avec les partenaires, de mettre à profit les compétences et le savoir-faire de chacun, et de bien comprendre les exigences, les conditions et les mécanismes applicables aux projets avant de commencer la mise en œuvre.

En vertu du principe de non-refoulement, il est interdit de transférer une personne d’une autorité à une autre s’il existe des raisons fondées de croire que cette personne courrait le risque d’être victime de violations de certains de ses droits fondamentaux, ce qui comprend en particulier la torture et autres formes de mauvais traitements, la privation arbitraire de la vie et la persécution. Le principe de non-refoulement figure expressément dans le droit international humanitaire, le droit international des droits de l’homme et le droit des réfugiés, bien que son champ d’application varie selon ces différentes branches du droit. L’esprit du principe de non-refoulement trouve aussi sa place dans le droit international coutumier.

Pour rester résilients à leur retour, les migrants ont des besoins qui touchent à toutes les dimensions

La présente section est consacrée aux besoins des migrants vulnérables qui rentrent dans leur pays d’origine. Elle couvre les migrants qui sont forcés de rentrer par des acteurs gouvernementaux ou qui rentrent faute d’avoir pu trouver des moyens de subsistance dans le pays de destination ou parce qu’ils ont rencontré d’autres difficultés. Elle ne tient pas compte des migrants qui rentrent volontairement avec des économies suffisantes, ni des migrants qui retournent chez eux volontairement après une guerre, car le soutien dont ils pourraient avoir besoin dans le pays d’origine entrerait dans d’autres catégories de soutien (développement économique, reconstruction, etc.).

Réglementation/gouvernance : Nul de doit être renvoyé dans un pays en violation du principe de non-refoulement.

Capital financier : Lorsqu’un migrant est forcé de rentrer dans son pays (parce qu’il n’a pas pu trouver une source de revenus ou parce qu’il rencontre d’autres difficultés), il se retrouvera souvent dans une situation financière plus précaire que lorsqu’il est parti. Il aura généralement dépensé une grande partie de ses économies pendant le voyage jusqu’au pays de destination et peut ne pas avoir été en mesure de mettre de l’argent de côté depuis le début du voyage. De plus, il retourne dans le pays qu’il a souvent quitté à l’origine pour des raisons économiques. Il est donc important qu’à son retour, il ne soit pas confronté aux mêmes difficultés économiques que lorsqu’il avait décidé de migrer et qu’il ait accès à des possibilités de générer des revenus.

Capital physique : Pendant qu’il voyage, le migrant doit trouver des endroits sûrs pour transiter où il pourra rester jusqu’à ce qu’il puisse effectuer la dernière partie du voyage jusqu’à chez lui. Il devra aussi avoir accès à des aliments nutritifs, à de l’eau potable et à des installations d’assainissement et d’hygiène. Un soutien médical peut également être nécessaire, car le migrant peut avoir souffert pendant le voyage jusqu’au point de destination et à partir de ce point.

Un soutien psychosocial est souvent extrêmement important pour les migrants qui rentrent de force, car ils auront souvent pris des risques énormes pour migrer et peuvent voir ce retour comme un échec. Un sentiment de désespoir ou des sentiments semblables sont courants chez eux.

Capital humain : L’éducation supérieure ou la formation professionnelle peuvent être importantes pour permettre aux migrants d’accéder à des revenus. Les enfants et les jeunes migrants peuvent aussi avoir besoin d’un soutien supplémentaire pour rattraper les mois ou années de scolarité manqués. Ils peuvent aussi devoir apprendre la langue de leur pays d’origine ou des habitudes culturelles particulières. Enfin, les migrants auront besoin d’informations pratiques sur ce à quoi ils devront s’attendre à leur retour et devront connaître leurs droits afin de veiller à ce que ceux-ci soient respectés pendant le voyage du retour et à l’arrivée dans le pays d’origine.

Capital social : Il est crucial que les migrants soient réunis avec les membres de leur famille dans le pays d’origine, car ceux-ci les aideront souvent en leur fournissant un logement, de la nourriture et d’autres formes de soutien. Toutefois, la réinsertion au sein de la famille et de la société peut ne pas être directe, car le migrant peut avoir changé ou la société peut être critique à l’égard de la personne qui a migré (si elle n’est pas parvenue à gagner beaucoup d’argent pendant la migration ou si elle a été victime d’exploitation sexuelle).

Capital naturel : Comme nous l’avons vu précédemment, un capital naturel insuffisant pouvant avoir constitué un moteur de migration au départ, il est important qu’il ne constitue pas une raison de migrer une nouvelle fois. Les migrants rentrés au pays peuvent avoir besoin de terres et d’eau de bonne qualité pour cultiver de la nourriture et peuvent dépendre des forêts et des lacs pour pêcher et s’approvisionner en eau, etc.

Le tableau ci-dessous résume les besoins en soutien externe que les migrants peuvent avoir en commun. Un soutien sera probablement nécessaire dans tous les domaines, mais une couleur plus foncée indique un besoin de soutien externe généralement plus important.

Exemples de besoins sur les plans du capital physique, du capital financier et du capital humain

MIGRANTS HONDURIENS, HONDURAS

Il arrive que les migrants qui rentrent retrouvent une situation où leurs possibilités d’emploi sont limitées. Des migrants honduriens de retour au Honduras ont expliqué que « les migrants ne trouvent pas de travail quand ils reviennent, car tout le monde les prend pour des criminels ». Il y a des emplois, mais « seulement pour quelques heures ou quelques jours, ce qui ne suffit pas à générer un revenu décent ou à faire vivre une famille ». Ils ont suggéré qu’il serait utile de proposer plus de formations et de soutien aux migrants rentrés au pays pour les aider à trouver du travail.

De plus, l’accès à des revenus financiers peut être entravé si les migrants qui sont de retour ont été blessés pendant le voyage. Les migrants interrogés ont souligné la nécessité, pour un migrant rentré au pays, de trouver du travail. Cependant, si le migrant a été grièvement blessé (par exemple s’il a perdu un bras ou une jambe), il a alors beaucoup de mal à subvenir à ses besoins, sans même parler de travailler. Les migrants se sont déclarés favorables à la conclusion d’accords avec des entreprises pour qu’elles offrent des emplois aux migrants rentrés au pays. « Il n’y a pas de meilleure thérapie pour reprendre le cours de votre vie que d’avoir un travail et de vous sentir utile », a déclaré l’un d’eux. « Beaucoup des personnes qui ont eu un accident décident de ne pas revenir et de rester au Mexique, parce qu’elles ne veulent pas que leurs proches soient obligés de les prendre en charge », a expliqué un autre.

MIGRANTS CONGOLAIS, KENYA

Des informations erronées au sujet de la réinstallation peuvent rendre certains migrants plus vulnérables encore. Au Kenya, des migrants congolais ont expliqué que des informations erronées étaient parfois communiquées sur les possibilités de réinstallation. Des migrants vendaient tout ce qu’ils possédaient et se rendaient à l’aéroport, où ils découvraient qu’ils n’étaient pas sur la liste et qu’ils devaient tout recommencer de zéro.

Exemples de besoins sur le plan du capital physique

MIGRANTS HONDURIENS, HONDURAS

 L’accès aux soins de santé sur le chemin du retour est considéré comme un besoin crucial. Les migrants honduriens interrogés ont expliqué qu’ils avaient eu différents besoins et vécu des expériences diverses en ce qui concerne l’accès aux soins de santé pendant le voyage du retour. Certains avaient par exemple été soignés à l’hôpital avant d’être expulsés, et on leur avait accordé un mois pour se rétablir. Certains avaient été renvoyés chez eux par avion, d’autres en autobus. Les migrants qui avaient été renvoyés par avion ont déclaré que c’était la meilleure option, car ils atterrissaient dans une grande ville, où il était plus facile de recevoir des soins médicaux. L’une des personnes interrogées avait été renvoyée en autobus quelques jours seulement après avoir perdu sa jambe. Elle avait failli mourir pendant le voyage et avait ensuite été abandonnée à la frontière, loin de toute structure médicale.

Certains migrants ressentent un sentiment d’échec lorsqu’ils rentrent dans leur pays, qui peut se muer en désespoir si le voyage les a rendus handicapés. « Lorsque vous rentrez, vous avez l’impression d’avoir échoué, et cela quand vous rentrez sains et saufs. Certains d’entre nous rentrent avec un bras ou une jambe en moins, si ce n’est les deux jambes ou pire. Là vous avez l’impression non seulement d’avoir échoué, mais qu’en plus vous n’êtes désormais plus bon à rien », ont expliqué les migrants.

Certains migrants sont traumatisés par les épreuves et les abus qu’ils ont vécus pendant leur migration. Les migrants honduriens ont confirmé qu’un soutien psychosocial était nécessaire pour surmonter les épreuves qu’ils avaient vécues pendant la migration : « Nous avons besoin d’un soutien psychologique à notre retour. Certains d’entre nous ont été violés, kidnappés ou ont vu des amis mourir. Ce n’est pas facile. »

Les pratiques intelligentes recensées ciblent le capital financier et le capital physique, ainsi que l’éducation.

Le tableau ci-dessous résume les pratiques intelligentes recensées pour cette étape.

Caractéristiques communes des pratiques intelligentes

Les pratiques intelligentes partagent quelques caractéristiques communes : elles visent à fournir des solutions à long terme et à court terme ; elles sont stables et constantes ; elles associent les migrants aux solutions ; elles sont ciblées ; elles sont mises en œuvre en partenariat avec des acteurs présents pour la plupart dans le pays.

Défis communs et enseignements tirés

Défis communs

Enseignements tirés

Défis communs

Il peut être difficile de suivre et d’évaluer l’efficacité des services, en particulier s’ils sont fournis le long de la route du retour, car le migrant passe ensuite à autre chose.

Enseignements tirés

Il est important de bien comprendre les exigences, les conditions et les mécanismes applicables aux projets, ainsi que les modalités de suivi, avant de commencer la mise en œuvre.

Défis communs

Il peut être difficile pour une organisation de fournir tous les services dont les migrants ont besoin, par exemple dans un centre pour migrants rentrés au pays.

Enseignements tirés

Il est utile de collaborer avec des partenaires et d’exploiter les compétences de chacun (un partenaire peut fournir les soins de santé, un autre le soutien psychosocial, un autre encore la nourriture, etc.