Interventions en faveur des migrants à l’arrivée dans le pays de destination

Certains migrants peuvent décider de régulariser leur statut dans le pays. Aux fins de ce rapport, cette étape concerne la période entre le moment où un migrant arrive dans le pays et celui où une décision lui est notifiée au sujet de sa demande de régularisation. La section qui suit passe en revue les besoins des migrants lorsqu’ils arrivent dans le pays de destination et présente dix pratiques intelligentes qui répondent à certains de ces besoins

Messages clés de la section

BESOINS DES MIGRANTS

  • À cette étape, il faut citer parmi les besoins des migrants la sécurité réglementaire, les besoins physiques de base, le besoin d’information et le regroupement familial. Avant tout, les migrants doivent pouvoir avoir accès à un processus de régularisation équitable et individualisé et doivent jouir de leurs droits fondamentaux. Pendant qu’ils attendent qu’une décision soit rendue, tous leurs besoins de base doivent être satisfaits, même si la plupart sont de nature temporaire. Être informés des modalités de la procédure de demande d’asile et de leurs droits est aussi très important pour les migrants à ce stade. Ils peuvent par ailleurs chercher à rétablir les liens qui auraient été rompus avec leurs proches.

PRATIQUES INTELLIGENTES

  • Les pratiques intelligentes recensées ciblent la réglementation, l’information, la santé et l’intégration au sein de la société.
  • Elles partagent quelques caractéristiques communes : elles visent à fournir des solutions à court et à long terme pour les migrants ; ce sont essentiellement des initiatives stables et constantes ; elles visent généralement à fournir des solutions aux migrants ; elles sont ciblées ; elles sont mises en œuvre en partenariat avec des acteurs qui sont pour la plupart présents dans le pays.
  • Les acteurs rencontrent quelques défis communs lorsqu’ils s’emploient à répondre aux besoins des migrants, notamment : une surcharge d’informations complexes ; un temps limité pour recueillir les preuves nécessaires aux fins des activités de plaidoyer ; des prises de position politiques qui ne sont pas toujours fondée sur des faits. Parmi les enseignements tirés, il faut citer qu’il est utile de faire appel à des interprètes communautaires pour transmettre les informations et que, même si les positions politiques sont ancrées, un plaidoyer fondé sur des faits peut avoir une valeur aux yeux du gouvernement.

Les besoins touchent à la sécurité réglementaire, aux besoins physiques de base, à l’information et au regroupement familial.

 

La présente section concerne les migrants qui cherchent à régulariser leur statut dans le pays de destination. Selon le pays d’origine du migrant et son pays de destination, la procédure peut durer de quelques mois à plusieurs années. Par exemple, en Allemagne, il faut actuellement compter en moyenne 5,3 mois pour qu’une décision soit rendue au sujet d’une demande d’asile1.

Réglementation/gouvernance : Avant toute chose, le migrant doit pouvoir accéder à une procédure de régularisation équitable et individualisée et doit pouvoir jouir de ses droits fondamentaux.

Capital financier : La période d’attente pouvant durer plusieurs mois, voire des années, il est important que la personne ait accès à des revenus. Il est cependant extrêmement rare que les migrants en attente d’une décision quant à leur statut soient autorisés à travailler.

Capital physique : Dans l’attente d’une décision, le migrant doit pouvoir répondre à tous ses besoins fondamentaux, même si la plupart sont de nature temporaire. Par exemple, il doit avoir accès : à un logement/hébergement temporaire, à de la nourriture, aux soins de santé et à des installations sanitaires adéquates. De plus, il aura souvent besoin d’un soutien psychosocial pour surmonter les traumatismes vécus depuis le point d’origine et la peur causée par l’incertitude de l’avenir.

Capital humain : L’information joue un rôle crucial à ce stade, car le migrant a besoin d’informations sur la procédure d’asile et sur ses droits. Le migrant devrait avoir une bonne connaissance du processus, du délai approximatif dans lequel il peut espérer une réponse, de la probabilité d’une décision positive, de ses droits s’il obtient l’asile et de ce qu’il adviendra de lui et de sa famille si la décision est négative. Des informations pratiques sur les moyens d’accéder à un logement temporaire, à de la nourriture, aux soins de santé, à l’éducation, etc. sont tout aussi essentielles, dans la mesure où le migrant y a rarement accès par les voies ordinaires. À cette étape, les mineurs sont tout particulièrement exposés au risque de lacunes dans leur éducation, surtout si la procédure dure plusieurs mois. L’accès à l’éducation pour les enfants et les jeunes en attente de régularisation est donc crucial.

Capital social : Le migrant peut ne pas être en mesure de bénéficier d’un regroupement familial à ce stade, mais il peut déjà s’employer à rétablir les liens familiaux qui auraient été rompus (s’il n’a pas encore pu le faire). Tandis que l’intégration au sein de la communauté d’accueil n’est pas encore garantie, l’acceptation par la communauté d’accueil potentielle aide le migrant à surmonter les difficultés restantes et peut favoriser l’intégration future.

Capital naturel : Les besoins en matière de capital naturel ne sont pas essentiels pendant que la personne est en attente d’une décision, du fait de la nature temporaire de cette étape.

 

 

Le tableau ci-dessous résume les besoins en soutien externe que les migrants peuvent avoir en commun. Un soutien sera probablement nécessaire dans tous les domaines, mais une couleur plus foncée indique un besoin de soutien externe généralement plus important.

Exemples de besoins sur les plans de la sécurité réglementaire, du capital humain (information) et du capital social (famille).

MIGRANTS SOMALIENS, KENYA

Le fait d’être en situation irrégulière génère un sentiment d’insécurité pour de nombreux migrants. Des migrants urbains somaliens ont expliqué que le principal problème était pour eux « d’obtenir des cartes pour résidents étrangers et le respect qui y était associé ». Ne pas avoir de papiers implique la menace constante de se faire arrêter. « Ce dont nous avons le plus besoin, c’est de nous sentir en sécurité », ont-ils expliqué.

MIGRANTS SYRIENS, TURQUIE

Dans certaines situations, des migrants sont automatiquement « régularisés ». En Turquie, tous les migrants syriens ont automatiquement le droit de rester indéfiniment en tant qu’ « invités ». De plus, ils ont le droit d’accéder à l’éducation, aux soins de santé, etc.

MIGRANTS CONGOLAIS, KENYA

Il arrive que les membres d’une famille n’obtiennent pas le même statut. Des migrants congolais ont raconté que les différents membres de leur famille avaient obtenu des statuts différents.

  • Un Congolais vivant à Nairobi depuis 2007 a fait savoir que sa première femme avait été enlevée par des rebelles et qu’il ignorait ce qui lui était arrivé. Sa deuxième épouse était avec lui à Nairobi, de même que les trois enfants qu’il avait eus avec sa première femme et les trois enfants qu’il avait eus avec la deuxième. Sa femme et ses enfants avaient vu leur statut régularisé, tandis que, pour une raison ou une autre, sa demande de régularisation à lui n’avait pas abouti.
  • Un autre Congolais vivant lui à Nairobi depuis 2001 a expliqué qu’il était arrivé quelques jours après sa femme et ses huit enfants, mais qu’ils n’avaient pas été reconnus comme une famille. Le statut du reste de la famille avait été régularisé, mais pas le sien. Il attendait depuis 2001 que le regroupement familial devienne officiel. Il semblait que son cas ait été reconnu récemment, ce qui pourrait donner lieu à une évolution positive en juillet 2016.

DEMANDEURS D’ASILE, SUÈDE

Certains migrants peuvent ne pas être régularisés par crainte et méconnaissance de la procédure de demande d’asile. Une des personnes interrogées, qui travaille avec les mineurs non accompagnés en Suède, a expliqué que la crainte et la méconnaissance de la procédure d’asile constituaient un important défi. Il y a tant de rumeurs, d’histoires et de malentendus que, parfois, les migrants n’osent pas raconter leur histoire, ce qui les aiderait pourtant à obtenir l’asile.

Les besoins touchent à la sécurité réglementaire, aux besoins physiques de base, à l’information et au regroupement familial.

Le tableau ci-dessous résume les pratiques intelligentes recensées pour cette étape.

Caractéristiques communes des pratiques intelligentes

Les pratiques intelligentes recensées à l’étape de l’arrivée partagent quelques caractéristiques : elles visent à fournir des solutions à court et à long terme pour les migrants, dans l’idée qu’ils pourraient rester plusieurs années ; ce sont essentiellement des initiatives stables et constantes, mais certaines sont suffisamment flexibles pour permettre une adaptation aux besoins spécifiques des migrants ; elles visent généralement à fournir des solutions aux migrants ; elles sont ciblées ; elles sont mises en œuvre en partenariat avec des acteurs qui sont pour la plupart présents dans le pays, à quelques exceptions près.

Défis communs et enseignements tirés

Défis communs

Enseignements tirés

Défis communs

Les volontaires et le personnel doivent, d’une part, gérer des informations complexes et, d’autre part, répondre à des questions très détaillées de la part des migrants.

Enseignements tirés

Des interprètes communautaires peuvent favoriser la transmission d’informations. Ils peuvent ainsi contribuer à protéger les migrants contre la discrimination, à garantir l’égalité de traitement et à améliorer l’efficacité des services publics pour les migrants.

Défis communs

Surchargés, les employés et les volontaires peuvent avoir du mal à documenter comme il se doit les éléments de preuve, ce qui peut entraver les activités de plaidoyer.

Enseignements tirés

La collecte d’éléments de preuve et le plaidoyer devraient faire partie intégrante des programmes, et des ressources humaines devraient y être affectées à tous les niveaux.

Défis communs

Le gouvernement peut avoir des prises de position marquées sur une question, ce qui peut le conduire à ignorer, pour des raisons politiques, le plaidoyer fondé sur des faits. Il peut alors être difficile d’influencer sa position à l’aide d’arguments factuels.

Enseignements tirés

Malgré des prises de position marquées, certains gouvernements reconnaissent la valeur d’une approche fondée sur des faits en matière de plaidoyer, qui peut leur permettre de se tenir informés de la réalité sur le terrain.

Une approche collaborative entre le secteur et les départements gouvernementaux compétents est la clé du changement.

Il peut être utile d’exploiter le potentiel de la marque Croix-Rouge/Croissant-Rouge dans les activités de plaidoyer en faveur du changement.

Associer des preuves indubitables du problème humanitaire à une solution ciblée constitue une stratégie efficace.

1 : Les défis et les enseignements tirés sont issus de pratiques intelligentes spécifiques et des discussions générales tenues avec les Sociétés nationales et d’autres acteurs.

2 : Les enseignements, qui doivent permettre de surmonter les défis, peuvent avoir été tirés de la pratique intelligente dans le cadre de laquelle le défi s’est posé, ou d’autres données d’expérience recueillies par Dalberg dans le cadre de l’étude.