La présente section est consacrée aux principales tendances observées dans le cadre de l’étude en ce qui concerne les moteurs de la migration, les besoins des migrants, les pratiques intelligentes et les éléments facilitateurs.

Messages clés de la section

MOTEURS DE LA MIGRATION

Les personnes migrent en quête d’une vie meilleure pour elles-mêmes ou pour les membres de leur famille. La migration peut être volontaire ou involontaire (due à un choc ou à un facteur externe), mais, la plupart du temps, elle procède d’un mélange de choix et de contraintes. Plusieurs motifs combinés poussent généralement les migrants involontaires à quitter leur domicile (ils tentent d’échapper à un conflit et à l’instabilité politique, à la violence ou à une catastrophe, ils sont apatrides ou ils ont été victimes de traite). Aux fins du présent rapport, il faut entendre par « migrant » tout type de migrant vulnérable, quels que soient les motifs de sa migration ou son statut juridique.

BESOINS COMMUNS ET INDIVIDUELS DES MIGRANTS

Pour être résilients, les migrants ont besoin de différentes formes de soutien externe qui ont de grandes chances de suivre un schéma commun, que l’on peut examiner sous l’angle des dimensions de la résilience et des besoins spécifiques. Ce schéma, toutefois, variera en fonction des caractéristiques et circonstances intrinsèques et extrinsèques de chaque migrant. Dans les camps de migrants, à l’arrivée dans le pays de destination et pendant le transit aux frontières, les migrants ont le plus souvent besoin d’un soutien correspondant à la plupart des dimensions de la résilience. Un soutien externe pour répondre aux besoins des migrants sur le plan de la réglementation et de la gouvernance est essentiel tout au long du parcours ; il en va généralement de même pour ce qui est du rétablissement des liens familiaux et de l’accès à des sources de revenus régulières, au logement, aux informations pratiques et au soutien psychosocial. (NOTE : Le rapport ne prétend pas offrir une analyse exhaustive des besoins et des vulnérabilités des migrants, mais se fonde sur les besoins, dans l’idée que les méthodes utilisées pour répondre aux besoins des migrants dans différents contextes peuvent être similaires.)

PRATIQUES INTELLIGENTES

Les migrants ont un énorme besoin d’assistance, et la Croix-Rouge et le Croissant-Rouge ont un rôle distinct et précieux à jouer du fait de leur réseau unique de volontaires, de leur présence mondiale, de leur accès aux communautés et de leur riche expérience. Les 59 pratiques intelligentes sont des pratiques contextuelles qui doivent être adaptées à d’autres situations. Les pratiques présentées dans le rapport touchent aux aspects suivants.
• Phase du parcours : séjours à long terme dans un pays de destination ou un pays intermédiaire (25 pratiques), pays d’arrivée (10), camps de migrants (6), transit aux frontières (6), pays d’origine (5) et retour (4).
• Dimension de la résilience : capital humain (~34 %) et besoins physiques (~29 %), et un plus petit nombre de pratiques touchant au capital social (~15 %), au capital financier (~12 %) ou à la réglementation et à la gouvernance (~10 %).
• Type de soutien : sensibilisation (21), assistance (16), protection (16) et plaidoyer (6).
• Distribution régionale : Europe (28), Moyen-Orient et Afrique du Nord (10), Asie-Pacifique (8), Amériques (7) Afrique subsaharienne (6).

ÉLÉMENTS FACILITATEURS

Pour pouvoir efficacement mettre en œuvre des pratiques intelligentes, les Sociétés nationales ont besoin d’un ensemble d’éléments facilitateurs. Ces éléments leur permettront de mettre l’accent sur la migration parmi d’autres priorités concurrentes. Le rapport fournit 13 exemples d’outils de facilitation.

MOTEURS DE LA MIGRATION

Aux fins du présent rapport, il faut entendre par « migrant » tout type de migrant vulnérable

Afin de rendre toute l’étendue des préoccupations humanitaires qui découlent de la migration, une définition large du concept de migrant a délibérément été utilisée : les migrants sont des personnes qui quittent ou fuient leur lieu de résidence habituel pour se rendre ailleurs – généralement à l’étranger – en quête de possibilités ou de perspectives meilleures et plus sûres. La migration peut être volontaire ou involontaire, mais, la plupart du temps, elle procède d’un mélange de choix et de contraintes.
Par conséquent, le rapport englobe les travailleurs migrants, les migrants apatrides et les migrants jugés en situation irrégulière par les autorités. Il concerne aussi les réfugiés et les demandeurs d’asile. La figure ci-dessous montre différents types de migrants dont le rapport tient compte.

1 La vulnérabilité est évolutive, des migrants non vulnérables peuvent devenir vulnérables. Par exemple, un étudiant peut devenir vulnérable en cas d’éclatement d’un conflit.

2 La protection au titre de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et du Protocole de 1967 n’englobe pas les personnes qui fuient la violence urbaine. Cependant, la protection au titre de la Déclaration de Carthagène sur les réfugiés étend la définition de réfugié aux personnes qui ont fui leur pays parce que leur vie, leur sécurité ou leur liberté étaient menacées par une violence généralisée, une agression étrangère, des conflits internes, une violation massive des droits de l’homme ou d’autres circonstances ayant gravement perturbé l’ordre public.

 

MOTEURS DE LA MIGRATION

Les personnes migrent en quête d’une vie meilleure pour elles-mêmes et/ou pour les membres de leur famille.

Les personnes migrent en quête d’une vie meilleure pour elles-mêmes et/ou pour les membres de leur famille. La migration peut être volontaire ou involontaire (due à un choc ou à un facteur externe), mais, la plupart du temps, elle procède d’un mélange de choix et de contraintes.

Migration involontaire

La migration involontaire découle d’un choc ou facteur externe :

  • conflit, instabilité politique, violence, persécution (1) ;
  • catastrophe naturelle (p. ex. sécheresse) ;
  • introduction clandestine/traite (2);
  • apatridie (statut d’une personne qui n’est reconnue par aucun gouvernement).

Les besoins élémentaires du migrant ne sont pas ou plus satisfaits. Par exemple, du fait d’un choc externe, une personne peut :

  • ne se voir offrir de garanties juridiques par aucun État ;
  • avoir perdu ses moyens de subsistance et sa stabilité financière ;
  • avoir perdu sa sécurité physique (sa vie est menacée, elle a perdu sa maison, n’a plus accès à de la nourriture, etc.) ;
  • avoir perdu sa famille et tout lien social ;
  • avoir perdu l’accès à l’éducation et à la formation pour ses enfants/adolescents.

Migration volontaire

La personne décide que son mode de vie ou celui de sa famille est inadéquat, et que celui-ci ne pourra pas s’améliorer sans passer par la migration. Par exemple, la personne peut estimer :

  • que ses moyens de subsistance et sa stabilité financière sont insuffisants ;
  • que ses conditions de vie – logement, accès à la nourriture et/ou à la santé – sont insuffisantes ;
  • qu’elle pourra être réunie avec des proches et des amis dans le pays de destination (si ceux-ci ont migré précédemment) ;
  • qu’elle pourra offrir de meilleures possibilités d’éducation à ses enfants/adolescents ailleurs ;
  • qu’elle pourra bénéficier d’une plus grande cohésion sociale ailleurs (par exemple pour les minorités dont les communautés sont géographiquement dispersées).

1 : La notion de persécution est définie par la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et son Protocole de 1967.

2 : Conformément au Protocole de Palerme, l’expression « traite des personnes » désigne le recrutement, le transport, le transfert, l’hébergement ou l’accueil de personnes, par la menace de recours ou le recours à la force ou à d’autres formes de contrainte, par enlèvement, fraude, tromperie, abus d’autorité ou d’une situation de vulnérabilité, ou par l’offre ou l’acceptation de paiements ou d’avantages pour obtenir le consentement d’une personne ayant autorité sur une autre aux fins d’exploitation.

Quatre éléments jouent bien souvent le rôle de moteurs de la migration involontaire.

NÉCESSITÉ DE FUIR UN CONFLIT, L’INSTABILITÉ POLITIQUE, LA VIOLENCE OU LA PERSÉCUTION : les cas de déplacement forcé lié à la violence, à l’instabilité politique ou à un conflit ne cessent d’augmenter et présentent des défis de plus en plus complexes pour les acteurs humanitaires. À la mi-2015, il y avait 20,2 millions de réfugiés dans le monde1. Les pays directement limitrophes d’une zone de conflit, dont beaucoup sont des pays en développement, sont ceux qui accueillent le plus grand nombre de réfugiés. À la fin du premier semestre 2015, l’Afrique subsaharienne accueillait le plus de réfugiés (4,1 millions), suivie de l’Asie-Pacifique (3,8 millions), de l’Europe (3,5 millions), et du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (3 millions). La région Amériques accueillait pour sa part 753 000 réfugiés2. Ces chiffres peuvent avoir évolué depuis cette date. En avril 2016 par exemple, plus de 4,8 millions de migrants originaires de la seule Syrie se trouvaient en Turquie (2,7 millions), au Liban (1 million), en Jordanie (0,6 million), en Irak (0,2 million) et en Égypte (0,1 million)3. Toutes les personnes fuyant la violence ne sont pas considérées comme des demandeurs d’asile, et beaucoup sont traitées comme des migrants en situation irrégulière qui ne bénéficient d’aucune protection internationale4. Par exemple, des millions de migrants tentent d’échapper à la violence des gangs sur le continent américain5.

NÉCESSITÉ DE FUIR UNE CATASTROPHE : les catastrophes d’origine climatique provoquent également de nombreuses migrations forcées6. Entre 2008 et 2013, les catastrophes ont fait 128,4 millions de nouveaux déplacés, soit 27,5 millions de personnes en moyenne chaque année. En 2013, 87,2 % des déplacements provoqués par une catastrophe se sont produits en Asie (19,1 millions de personnes), 8,2 % en Afrique (1,8 million de personnes) et 4,1 % dans les Amériques (892 000 personnes). Les pays ayant connu les niveaux absolus de déplacement les plus élevés au cours de la période 2008-2013 sont la Chine (plus de 54 millions de personnes), l’Inde (plus de 26 millions), les Philippines (plus de 19 millions), le Pakistan (plus de 13 millions) et le Bangladesh (près de 7 millions)7. Les statistiques des Nations Unies relatives aux personnes déplacées n’incluent généralement pas les migrants qui quittent leur domicile du fait de catastrophes naturelles et d’autres événements liés au climat. Il y a actuellement 25 à 30 millions de migrants environnementaux dans le monde.

APATRIDIE : le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) estime qu’au moins 10 millions de personnes dans le monde n’ont aucune nationalité. L’apatridie peut se produire pour diverses raisons, notamment les suivantes : politiques et lois ne reconnaissant pas certains groupes ethniques ou religieux (par exemple, plus d’un million de personnes sont apatrides dans l’État de Rakhine, au Myanmar, du fait de leur origine ethnique ; en République dominicaine, des dizaines de milliers de personnes d’origine haïtienne nées en République dominicaine ont perdu leur nationalité) ; apatridie liée au sexe (quelque 27 États n’autorisent pas les femmes à transmettre leur nationalité, leurs enfants pouvant se retrouver apatrides lorsque le père est inconnu, a disparu ou est décédé) ; création de nouveaux États ou modification d’États existants (l’Estonie et la Lettonie, par exemple, comptent respectivement environ 86 000 et 262 000 apatrides) ; conflits. Dans de nombreux pays, les personnes apatrides n’ont pas accès à des documents d’identité, à l’emploi légal, à l’éducation et aux services de santé, bien qu’il y ait des exceptions8.

INTRODUCTION CLANDESTINE/TRAITE DES PERSONNES : la traite des personnes est une source importante de migrants vulnérables9, mais il est difficile de connaître le nombre exact de cas dans le monde. À l’heure actuelle, on ne dispose d’aucune estimation fiable du nombre de personnes victimes de la traite dans le monde. Toutefois, en 2012, l’Organisation internationale du Travail (OIT) a estimé que le nombre de personnes victimes du travail forcé, de la traite et de l’esclavage moderne s’élevait à 21 millions10. Selon un rapport publié par l’OIT en 2014, dans l’économie privée, le travail forcé génère 150 milliards de dollars É.U. de gains illégaux annuels, dont 99 milliards de dollars proviennent de l’exploitation sexuelle à des fins commerciales, tandis que les 51 autres milliards résultent de la traite à des fins d’exploitation économique, y compris le travail domestique, l’agriculture et d’autres activités économiques11.

Cas concrets illustrant les moteurs de la migration au niveau individuel.

MIGRANTS HONDURIENS, HONDURAS

Quelque 651 000 migrants en situation irrégulière originaires du Mexique, d’Amérique centrale et d’autres pays ont tenté de passer la frontière entre le Mexique et les États-Unis en 2014 (470 000 ont été arrêtés1, tandis que 165 000 auraient réussi à passer la frontière)2.

Échapper à la violence et trouver des possibilités d’emploi Des migrants honduriens de retour dans leur pays ont indiqué que les principales raisons qui les ont poussés à quitter le Honduras étaient les possibilités d’emploi insuffisantes et la criminalité. « Lorsque vous atteignez l’âge de 25 ans, vous ne trouverez plus de travail parce que vous êtes trop vieux », témoigne l’un d’eux. « J’ai quatre enfants qui ont obtenu un diplôme, mais aucun n’a trouvé d’emploi », explique un autre. « J’ai un emploi, mais je gagne tout juste assez pour vivre », poursuit un troisième. Tous disent aussi vouloir échapper à la violence, car ils craignent pour leur vie : « soit on part, soit on va se faire tuer ».
D’après une étude réalisée en 2015 par le HCR sur les femmes migrantes d’Amérique centrale, 85 % des migrantes vivaient dans des quartiers contrôlés par le crime organisé. Pour 64 % des femmes interrogées, les menaces et les attaques directes de ces groupes criminels étaient l’une des principales raisons de leur départ. De plus, 58 % des femmes interrogées avaient été victimes d’agressions et de violences sexuelles3.

RÉFUGIÉS PALESTINIENS, LIBAN

Environ 450 000 Palestiniens vivent au Liban4, dont la plupart appartiennent à la deuxième ou même à la troisième génération des Palestiniens qui ont fui la guerre en 1948. Quelque 53 % d’entre eux vivent dans des camps gérés par l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA)5. Ils sont autorisés à vivre hors des camps, mais leurs droits politiques, économiques et sociaux sont lacunaires. Par exemple, les Palestiniens ne sont pas autorisés à détenir des biens immobiliers, et vingt professions leur sont interdites. Du fait de la vague de migrants en provenance de Syrie, de nombreux Palestiniens commencent également à migrer en Europe. Leur nombre n’est pas connu.

Trouver de meilleures perspectives économiques –  Une Palestinienne vivant à Beyrouth, mère de plusieurs enfants, explique que son mari a quitté le Liban pour émigrer en Allemagne l’année dernière. Il a voyagé par la mer pour rejoindre ce pays. Il était enseignant dans une école locale, mais à la suite d’un accident qui lui a valu des blessures à la jambe gauche, il n’a plus pu trouver de travail. Il avait aussi besoin de soins chirurgicaux qu’il ne pouvait pas obtenir au Liban. Voyant la vague migratoire, il a décidé de migrer lui aussi en quête de meilleures perspectives pour pouvoir subvenir aux besoins de sa famille.

MIGRANTS MONGOLS, SUÈDE

D’après les estimations, il y avait au moins 56 750 migrants mongols en 2013. Tandis que la plupart émigrent en Russie et en République de Corée, 1 810 au moins ont émigré en Suède1.

Trouver de meilleures perspectives économiques – Des femmes mongoles ayant émigré en Suède ces dernières années (il y a 12 ans pour les migrantes les plus anciennes, deux ans pour les plus récentes) ont déclaré avoir migré pour des raisons financières : « Je voulais trouver du travail ». Ces migrantes ont expliqué que les femmes doivent nourrir leur famille et s’occuper de leurs enfants et ont donc besoin d’une source de revenus. Par ailleurs, d’autres facteurs ont contribué à leur décision de migrer, parmi lesquels la traite des personnes, le trafic d’organes et les violences contre les femmes.

MIGRANTS DU MYANMAR, THAÏLANDE

Les estimations suggèrent que jusqu’à 10 % de la population du Myanmar migre à l’étranger. Ce pourcentage comprend les migrations à court et moyen terme vers des pays de la région par des voies irrégulières. Les migrations à destination de la Thaïlande et de la Malaisie prédominent et représentent plus de trois millions de migrants. Leurs motifs sont des moyens de subsistance insuffisants, de mauvaises conditions socio-économiques et l’insécurité engendrée par les conflits prolongés dans les communautés d’origine. Des salaires plus élevés et une demande pour des travailleurs moins qualifiés dans les pays voisins constituent des facteurs d’attraction2.

 

Trouver de meilleures perspectives économiquesUne migrante du Myanmar vivant en Thaïlande a expliqué qu’elle vivait avant avec sa grand-mère, une commerçante très pauvre, et dix autres de ses petits-enfants. Étant la plus âgée de ses petites filles, elle avait dû abandonner l’école pour l’aider au marché, ce qui avait permis à ses frères et sœurs d’aller à l’école. Elle s’était rendue en Thaïlande dans l’espoir d’y trouver de meilleures perspectives économiques, malgré l’opposition de la vieille dame.

MIGRANTS SOMALIENS À NAIROBI, KENYA

À cause de l’insécurité, des mauvaises perspectives économiques et des catastrophes naturelles telles que les sécheresses et les inondations, quelque 14 % de la population somalienne, soit environ un million de personnes, a migré, essentiellement vers les pays voisins. Le Kenya est le pays qui accueille le plus grand nombre de migrants somaliens, soit 474 483 personnes selon les estimations3.

Échapper au conflitDes migrants somaliens installés à Nairobi ont expliqué que l’insécurité dans leur pays les avait poussés à quitter la Somalie. La plupart ont des proches qui ont perdu la vie ou dont ils ont perdu la trace à cause du conflit.

MIGRANTS SYRIENS À ANKARA, TURQUIE

Depuis 2011, le conflit en Syrie a forcé des millions de personnes à fuir leur domicile. En avril 2016, plus de 4,8 millions de migrants syriens se trouvaient en Turquie (2,7 millions), au Liban (1 million), en Jordanie (0,6 million), en Irak (0,2 million) et en Égypte (0,1 million)1. De plus, 972 012 Syriens avaient déposé une demande d’asile en Europe2.

Échapper au conflitUne jeune syrienne (la petite vingtaine) était étudiante en psychologie, dans sa dernière année d’université, avant de migrer vers la Turquie. Elle a quitté la Syrie à l’été 2015. Sa famille a décidé de partir après que sa mère avait été arrêtée pour être interrogée. La mère avait finalement été relâchée, mais avait été prévenue que toute la famille continuerait d’être surveillée en permanence. La jeune migrante et ses proches, emportant le peu qu’ils pouvaient porter, ont fui à destination du pays voisin, la Turquie, en quête de sécurité. Avant de migrer, la jeune femme était volontaire auprès du Croissant-Rouge arabe syrien. Elle est désormais volontaire pour la Société du Croissant-Rouge turc.

MIGRANTS CONGOLAIS À NAIROBI, KENYA

Au moins 70 groupes armés opéreraient actuellement dans la partie orientale de la République démocratique du Congo (RDC)3. À cause du conflit, quelque 430 000 migrants de RDC se trouvent dans les pays voisins, en particulier au Burundi, au Rwanda, en Ouganda et en République-Unie de Tanzanie4.

Échapper à la violence – Un jeune congolais de 19 ans se trouvant à Nairobi a expliqué que son père était l’une des personnes instruites du village. Lorsque des miliciens ont essayé de le trouver pour le tuer, son père a dû fuir, et le jeune homme ne l’a jamais revu, mais a appris qu’il était mort au Kenya. Après la fuite de son père, des proches ont essayé de forcer sa mère à épouser un autre membre de la famille, comme le veut la tradition. Sa mère a refusé et a fait l’objet d’attaques. Elle a fui avec ses quatre enfants après avoir pu économiser un peu d’argent.

Source : 1 : http://data.unhcr.org/syrianrefugees/regional.php ; 2 : Cela représente un peu moins de 10 % des personnes qui ont fui le conflit (y compris les déplacés internes) pour trouver la sécurité en Europe ; 3 : http://www.cfr.org/global/global-conflict-tracker/p32137#!/conflict/violence-in-the-democratic-republic-of-congo; 4 : www.unhcr.org/pages/49e45c366.html. Dalberg s’est entretenu avec des migrants dans le cadre de tables rondes lors de visites sur le terrain.

BESOINS COMMUNS

La résilience des migrants dépend de plusieurs formes de soutien externe suivant généralement un schéma commun.

La Fédération internationale estime que le meilleur moyen de soutenir les migrants consiste à les aider à être résilients tout au long de leur parcours. S’ils sont résilients, les migrants seront en mesure de mieux gérer les risques et de surmonter les chocs externes associés à la migration. Si toutes les dimensions de la résilience sont importantes, certaines prédominent par rapport à d’autres à différentes étapes du parcours :

  1. Premières démarches : Dans leur pays d’origine, les migrants doivent pouvoir accéder à l’information, à la formation et à un soutien afin de garantir que les systèmes règlementaires protègent leurs droits.
  2. Transit aux frontières : Alors que les migrants ont entamé leur voyage, la sécurité réglementaire et l’accès aux informations pratiques demeurent importants, mais le fait de disposer d’un filet de sécurité financier, le maintien des liens familiaux et la réponse aux besoins physiques (accès au logement, à la nourriture et à la santé et sécurité en général) deviennent plus urgents.
  3. Camps de migrants : Si un migrant est retenu dans un camp, le système réglementaire déterminera s’il pourra satisfaire à ses besoins essentiels, comme celui de trouver un emploi. Les possibilités d’emploi peuvent permettre à un migrant de subvenir à plusieurs de ses besoins, faute de quoi il aura probablement besoin d’un soutien externe pour tout ce qui a trait aux besoins physiques, à l’éducation, aux informations pratiques et au soutien psychosocial. Les besoins sociaux des migrants commencent ici à gagner en importance, car les migrants doivent se faire accepter par la communauté d’accueil, doivent s’intégrer au sein de la communauté du camp et peuvent avoir plus de temps pour rétablir leurs liens familiaux.
  4. Arrivée : Les migrants doivent pouvoir bénéficier d’une procédure de régularisation équitable et individualisée et accéder aux services de base lorsqu’ils arrivent dans le pays de destination. Pendant qu’ils attendent qu’une décision soit rendue, ils auront besoin d’accéder à des revenus ou à d’autres moyens de subvenir à leurs besoins essentiels. Les informations relatives à la procédure et à leurs droits et les informations pratiques concernant l’accès à un logement temporaire, à la nourriture, aux soins de santé, à l’éducation, à l’assistance juridique, au soutien psychosocial, etc. sont vitales. Les migrants peuvent vouloir essayer de rétablir les liens familiaux qui auraient été rompus. L’acceptation par la communauté d’accueil potentielle aide les migrants à surmonter les difficultés qui se posent encore et peut contribuer à leur intégration future.
  5. Séjours à long terme : Les migrants doivent être en mesure de rester dans le pays, de le quitter en toute sécurité lorsqu’ils le souhaitent et d’accéder au logement, à la nourriture, aux soins de santé, à l’éducation et aux possibilités d’emploi. L’accès à des activités génératrices de revenus est particulièrement important, car il permettra aux migrants de devenir autosuffisants. Toutefois, même lorsque les migrants ont un emploi ou ont accès à une source de revenus, un soutien externe peut être nécessaire, car les salaires sont souvent peu élevés, et l’accès au logement, à la nourriture, etc. reste fragile. Une fois que les besoins physiques des migrants sont satisfaits, leur besoin en soutien psychosocial gagne en importance, car ils sont alors prêts à commencer à surmonter les traumatismes vécus pendant le parcours migratoire. Les enfants, les jeunes et certains adultes doivent pouvoir accéder à l’éducation et à la formation professionnelle. Les migrants peuvent vouloir s’employer à rétablir tous les liens familiaux qui ont été rompus. Ils ont également besoin de sentir qu’ils appartiennent à la nouvelle communauté, la langue et les diverses normes culturelles pouvant cependant constituer des obstacles à l’intégration.
  6. Retour1: Le principe de non-refoulement interdit le renvoi. Dans de nombreux cas, lorsque les migrants retournent dans leur pays d’origine, ils se retrouvent plus vulnérables financièrement que lorsqu’ils sont partis. Ils doivent pouvoir accéder à des possibilités de générer des revenus. Le soutien psychosocial est souvent très important pour permettre aux migrants de surmonter les traumatismes vécus et le sentiment d’échec. Il est également important que les migrants soient réunis avec leur famille dans leur pays d’origine, car les proches leur apportent souvent une aide en leur fournissant un hébergement, de la nourriture, etc.

1 : Aux fins du présent rapport, on entend par « retour » le retour dans le pays d’origine. Il n’est pas tenu compte des déplacements vers un pays tiers, car les besoins connexes sont couverts à différentes étapes (transit aux frontières, camps de migrants, arrivée et/ou séjours à long terme). Source : Entretiens et recherches conduits par Dalberg.

La résilience des migrants repose sur six dimensions (réglementation, capital financier, capital physique, capital humain, capital social et capital naturel), pour lesquelles un soutien peut être nécessaire. Chaque dimension de la résilience se compose de besoins spécifiques. Le tableau ci-dessous donne un aperçu des besoins en soutien externe que les migrants peuvent avoir en commun pendant leur parcours. S’il y a de fortes chances qu’un soutien soit nécessaire dans tous les domaines, une couleur plus foncée indique un besoin de soutien externe généralement plus important. Le code couleur d’un besoin en soutien est établi par rapport aux autres besoins à la même étape et au même besoin aux autres étapes du parcours migratoire.

Certaines étapes du parcours et certaines dimensions de la résilience requièrent généralement un soutien externe accru

Soutien externe à chaque étape du parcours

  • Dans les camps de migrants, à l’arrivée dans le pays de destination et lors du transit aux frontières, les migrants auront probablement besoin d’un soutien pour chacune des dimensions de la résilience, car pendant ces étapes, ils sont plus exposés aux chocs externes potentiels ou plus dépendants des acteurs externes pour subvenir à leurs besoins (par exemple dans les camps de migrants). De plus, à ces étapes, les migrants ont généralement moins la possibilité de compter sur leurs propres capacités pour assurer leur résilience. Il leur est par exemple plus difficile de trouver des sources de revenus ou de pouvoir compter sur leur famille et leurs amis.
  • Pendant les séjours à long terme et au retour, les migrants auront besoin d’un soutien pour certaines seulement des dimensions de la résilience, car à ces étapes, ils sont généralement plus à même de pouvoir compter sur leurs propres capacités pour assurer leur résilience. Par exemple, ils peuvent avoir trouvé des sources de revenus ou peuvent compter sur leur famille et leurs amis. Il reste cependant hautement probable que beaucoup de migrants ne puissent pas assurer leur résilience et aient besoin d’un soutien pour la plupart des dimensions.
  • Dans le pays d’origine, la plupart des besoins ne sont pas applicables, parce qu’ils peuvent ne pas encore exister ou parce que des initiatives destinées aux déplacés internes et aux membres vulnérables des communautés locales (qui ne font pas partie du champ de l’étude) contribuent à y répondre. Le seul besoin des futurs migrants internationaux qui puisse être visé par des initiatives destinées aux déplacés internes et membres vulnérables des communautés locales est la fourniture d’informations pertinentes pour les préparer à leur voyage à l’étranger. Des activités de plaidoyer peuvent aussi être menées pour faire en sorte que les migrants puissent quitter le pays en toute sécurité.

Soutien externe pour chaque dimension de la résilience

  • Le soutien externe visant à répondre aux besoins des migrants sur le plan de la réglementation et de la gouvernance est essentiel tout au long de leur parcours. En effet, les migrants sont trop éloignés des décideurs pour plaider leur cause eux-mêmes. Or le statut juridique d’un migrant tout au long de son parcours va influencer fortement sa vulnérabilité et son besoin en soutien externe dans d’autres domaines. Par exemple, si une personne n’est pas autorisée à franchir légalement une frontière, elle devra emprunter des voies plus dangereuses pour se rendre dans le pays concerné ; si une personne n’est pas autorisée à travailler dans les pays de transit ou de destination, elle ne sera pas en mesure de pourvoir à ses besoins ; si une personne n’est pas autorisée à louer légalement un logement, elle dormira dans la rue, fera appel au marché noir ou dépendra d’un soutien externe.
  • Parmi les autres domaines pour lesquels un soutien sera vraisemblablement nécessaire tout au long du parcours du migrant, il faut citer le rétablissement des liens familiaux, l’accès à des sources de revenus régulières, l’accès au logement, l’accès aux informations pratiques, les informations sur les droits et le soutien psychosocial.
  • Les autres besoins requièrent aussi un soutien à la plupart des étapes du parcours, mais ils ne revêtent généralement un caractère urgent qu’à certaines étapes spécifiques. Néanmoins, bon nombre de migrants peuvent avoir besoin d’un soutien pour répondre à ces besoins tout au long de leur parcours.
  • La dimension du capital naturel est importante, mais exige un soutien externe moindre pendant le parcours migratoire. Les interventions dans les pays d’origine, de transit et de destination qui touchent au capital naturel s’inscrivent normalement dans des initiatives nationales de développement et ne tiennent pas compte de la perspective migratoire.

BESOINS INDIVIDUELS

Le schéma des besoins est influencé par les caractéristiques et circonstances intrinsèques et extrinsèques de chaque migrant

Un migrant est considéré comme vulnérable après avoir été jugé comme tel à l’issue d’une évaluation approfondie de sa situation et de ses besoins, non parce qu’il appartient à une catégorie prédéfinie. C’est la combinaison des caractéristiques et circonstances intrinsèques et extrinsèques à un moment donné qui définit la vulnérabilité d’une personne. Cette vulnérabilité est dynamique et évolue avec le temps. La figure ci-dessous montre comment diverses caractéristiques intrinsèques et extrinsèques s’associent pour rendre une personne plus ou moins vulnérable (il y a bien sûr des exceptions).

ACTION DES SOCIÉTÉS NATIONALES

Le besoin d’assistance est énorme, et la Croix-Rouge et le Croissant-Rouge ont un rôle unique à jouer.

Réseau unique de volontaires

Le Mouvement compte actuellement plus de 17 millions de volontaires.

Présence mondiale

Unique organisation présente dans 190 pays.

Accès aux communautés

Grâce à ses volontaires des sections locales, la Croix-Rouge et le Croissant-Rouge ont accès aux communautés, même les plus difficiles à atteindre.

Vaste expérience

Ensemble, les Sociétés nationales peuvent se prévaloir de mettre en œuvre de multiples pratiques intelligentes pour répondre aux besoins des migrants, et de cumuler de nombreuses années d’expérience dans ce domaine.1

1 Le rapport vise à aider la Croix-Rouge et le Croissant-Rouge à renforcer encore leur vaste expérience.

ACTION DES SOCIÉTÉS NATIONALES

Les Sociétés nationales et leurs partenaires mettent en œuvre de multiples pratiques intelligentes

NOTE : Les chiffres indiquent le nombre de pratiques intelligentes présentées dans le présent rapport pour chacune des étapes et par rapport aux différentes dimensions de la résilience. Bien que plusieurs pratiques intelligentes touchent à plusieurs dimensions de la résilience, nous n’avons tenu compte, aux fins de cette analyse, que de la principale dimension couverte par chaque pratique.

Le rapport recense des pratiques intelligentes mises en œuvre dans chaque région, à chaque phase du parcours d’un migrant et pour toutes les dimensions de la résilience. Les 59 pratiques présentées dans le rapport constituent une source d’idées susceptibles d’inspirer les Sociétés nationales et d’autres acteurs en vue de la mise au point de nouvelles approches destinées à répondre aux besoins des migrants.

  • Phase du parcours: La plupart des interventions présentées dans le rapport concernent les séjours à long terme dans un pays de destination ou un pays intermédiaire (25 pratiques), ainsi que les interventions dans les pays d’arrivée (10), dans les camps de migrants (6) et au moment du transit aux frontières (6). Quelques exemples portent sur les possibilités de soutien dans le pays d’origine (5) et au moment du retour (4), et trois exemples de pratiques intelligentes s’appliquent à plusieurs étapes du parcours des migrants.
  • Dimension de la résilience: Le rapport recense de nombreuses pratiques qui répondent aux besoins en matière de capital humain (~34 %) et aux besoins physiques (~29 %). Il présente aussi un plus petit nombre de pratiques qui touchent au capital social (~15 %), au capital financier (~12 %) ou à la réglementation et à la gouvernance (~10 %). S’agissant des besoins spécifiques liés aux différentes dimensions de la résilience, de multiples exemples de pratiques portent sur l’accès à l’information, l’éducation et la formation professionnelle, la création de revenus et la santé physique, mais beaucoup moins ciblent le logement, la nourriture, les articles non alimentaires, les filets de sécurité ou l’eau, l’assainissement et l’hygiène.
  • Type of soutien: La plupart des pratiques intelligentes présentées dans le rapport concernent la sensibilisation (21), l’assistance (16) et la protection (16). Quelques pratiques enfin touchent au plaidoyer (6).

Ensemble, les pratiques intelligentes couvrent la plupart des principes de la Fédération en matière de migration.

Bien que les pratiques intelligentes recensées couvrent de nombreux principes, celles touchant aux principes « Inclure les migrants parmi les bénéficiaires des programmes humanitaires » [P2], « Lier l’assistance, la protection et le plaidoyer humanitaire en faveur des migrants » [P5] ou « Agir tout au long des chemins de migration » [P7] semblent moins représentées. Par ailleurs, quatre pratiques seulement concernent l’aide au retour [P8], tandis qu’aucune ne vise à atténuer les pressions dans les pays d’origine1.

1 : Les interventions visant à atténuer les pressions à l’émigration dans les pays d’origine n’ont pas été incluses dans le champ de l’étude, car elles devraient s’inscrire dans des initiatives nationales ciblant les populations vulnérables.

Les pratiques intelligentes recensées dans le rapport proviennent du monde entier.

Cinq principaux choix de conception ressortent des pratiques intelligentes recensées

Les pratiques intelligentes ont été comparées au regard de cinq critères simples1

  1. Solutions à court ou à long terme pour les migrants
    • L’intervention cible-t-elle essentiellement les besoins immédiats ou vise-t-elle à faire en sorte que les besoins des migrants soient satisfaits à long terme (y compris à permettre aux migrants de subvenir eux-mêmes à leurs besoins) ?
    • La nécessité de mettre l’accent sur des solutions à court terme ou à long terme dépend de l’étape du parcours. Lors des étapes plus courtes où les choses vont plus vite (transit aux frontières), les interventions tendent à couvrir les besoins à court terme pour répondre à la nature de la migration à cette étape. À d’autres étapes, où les choses vont moins vite, les interventions visent habituellement à fournir des solutions à long terme. Dans la mesure où des besoins à court terme existent à chaque étape, des interventions ciblant ces besoins sont mises en œuvre à toutes les étapes.
  2. Initiatives stables et constantes ou flexibles et dynamiques
    • Les bénéficiaires cibles, les services fournis, ainsi que le moment et l’endroit où les services sont fournis varient-ils facilement, ou ces éléments sont-ils constants et prévisibles ?
    • La nature de l’étape définit généralement la dynamique du soutien. Aux étapes plus courtes où les choses se passent plus rapidement (transit aux frontières), les interventions sont généralement plutôt flexibles et dynamiques, pour répondre à la nature de la migration à cette étape. À d’autres étapes, où les choses vont moins vite, les interventions tendent à être plus stables et plus constantes. Toutefois, les interventions aux étapes rapides et courtes devraient être planifiées et structurées à l’avance, tandis que les interventions aux étapes « moins rapides » devraient être suffisamment flexibles pour pouvoir être adaptées aux besoins. De plus, il est sans doute nécessaire de mettre en œuvre des interventions plus flexibles et dynamiques à l’arrivée et au moment du retour (en particulier pour le voyage de retour).
  3. Initiatives visant à associer les migrants à l’élaboration des solutions ou visant à leur fournir des solutions
    • L’initiative fournit-elle directement une solution aux migrants, ou leur donne-t-elle les moyens de participer à la solution, par exemple en leur fournissant des outils et des compétences ou en leur offrant des choix ?
    • La nature de l’étape détermine la nature du soutien. Par exemple, aux étapes à plus court terme (transit aux frontières, camps de migrants, arrivée et retour), les interventions tendent à fournir des solutions, tandis qu’aux étapes plus longues (pays d’origine, camps de migrants, séjours à long terme et retour), elles visent habituellement à associer les migrants aux solutions. L’urgence des étapes à plus court terme explique la nécessité de fournir des solutions, mais il serait sans doute possible de chercher davantage à associer les migrants aux interventions à ces étapes aussi.

 

  1. Initiatives ciblées ou intégrées dans des programmes existants
    • L’initiative a-t-elle été élaborée sur mesure pour les migrants ou a-t-elle intégré les migrants dans des interventions plus globales ?
    • La plupart des pratiques intelligentes recensées dans le rapport sont des initiatives ciblées, probablement parce que les acteurs qui ont contribué à l’étude ont évoqué en priorité les initiatives ciblées. Il existe certainement d’autres initiatives intégrées visant les pays d’origine, les séjours à long terme et le retour des migrants. Mais si tel n’est pas le cas, les initiatives existantes devraient être adaptées pour davantage tenir compte des questions liées à la migration. Lors du transit, dans les camps de migrants et à l’arrivée, les migrants ont généralement besoin de solutions plus ciblées du fait de la nature de ces étapes.
  2. Initiatives mises en œuvre en collaboration avec des acteurs présents dans le pays ou avec des acteurs basés dans d’autres pays
    • L’initiative est-elle mise en œuvre essentiellement en collaboration avec des acteurs présents dans le pays (il peut s’agir d’acteurs locaux ou d’acteurs internationaux menant des opérations dans le pays) ou plutôt avec des acteurs basés dans d’autres pays ?
    • À quelques exceptions près, la plupart des pratiques intelligentes présentées dans le rapport sont mises en œuvre avec des partenaires présents dans le pays. Cela paraît logique en ce qui concerne les camps de migrants et les séjours à long terme, mais il existe néanmoins d’importantes possibilités d’intensifier les initiatives transfrontalières, en particulier dans les pays d’origine, au moment du transit aux frontières, à l’arrivée et au retour.

Certaines caractéristiques communes sont ressorties des pratiques intelligentes à chacune des étapes du parcours migratoire. Ces caractéristiques sont mises en avant tout au long du rapport et sont résumées dans le tableau ci-dessous.

1 : Ces caractéristiques communes ne constituent pas un jugement de ce que devraient être les pratiques intelligentes. Elles ont une simple visée descriptive des pratiques recensées. Cela permet de souligner qu’il existe des points communs et donne une idée des questions dont il faut absolument tenir compte pour élaborer des pratiques intelligentes.

Quelques défis communs et enseignements tirés

Défis communs et enseignements tirés

Enseignements tirés

Atteindre le migrant ou la communauté de migrants pour lui/leur faire connaître les services disponibles.

Établir des liens solides avec les communautés/groupes de migrants dans lesquels beaucoup de migrants partent/sont en transit/arrivent peut permettre de les aider plus facilement.

Déterminer les besoins à satisfaire et suivre la situation pour évaluer si le soutien fourni a permis d’y répondre. Cette tâche est particulièrement difficile lorsque les migrants partent peu après avoir bénéficié des services et si les avantages procurés par ces services ne se manifestent qu’à l’étape suivante du voyage.

Créer des liens avec des petits groupes de migrants et les encourager à formuler leurs commentaires aux différentes étapes du parcours peut permettre d’obtenir leur avis sur les services.

Recueillir les avis des migrants à une étape du parcours concernant le soutien reçu à une étape antérieure peut constituer une approche de collaboration transfrontalière et pourrait améliorer les services aux migrants.

Fournir un soutien aux migrants en situation irrégulière dans des contextes politiques complexes.

Se prévaloir du mandat humanitaire de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge est une approche qui a porté ses fruits pour certaines Sociétés nationales.

Dans certains contextes, travailler en toute discrétion, sans faire de publicité, a amené le gouvernement à accepter de « fermer les yeux » sur le soutien fourni.

Apporter une valeur ajoutée claire au gouvernement, par exemple en lui fournissant des données anonymes sur le nombre de migrants en situation irrégulière dans des zones spécifiques, peut l’amener à accepter les services fournis.

Pour une seule organisation, fournir tous les services dont les migrants ont besoin à une étape donnée.

Travailler en étroite collaboration avec des partenaires, même en un unique endroit, est un moyen efficace de tirer profit des compétences de chaque partenaire et de garantir des services de haute qualité aux migrants.

Éviter d’engendrer la perception, chez les communautés d’accueil vulnérables, que la Société nationale aide les migrants plus qu’elles, ce qui peut générer de l’hostilité à l’égard des migrants.

Associer les communautés d’accueil les plus vulnérables à l’intervention, sur la base d’un critère de vulnérabilité clairement établi incluant tant les migrants que les populations d’accueil, peut réduire les tensions.

Traiter les questions délicates telles que la violence sexuelle ou la maltraitance avec les migrants.

Travailler régulièrement avec les migrants et leurs chefs communautaires pour gagner leur confiance devrait constituer la première étape avant d’aborder les questions délicates.

Assurer la présence de pairs aux discussions sur les questions sensibles afin de créer un environnement plus rassurant.

Attirer, développer et retenir les talents (personnel et volontaires).

Recruter des volontaires à l’aide d’une vaste stratégie de mobilisation auprès des migrants, des étudiants et des communautés d’accueil peut permettre d’attirer de nouveaux talents. Conclure des partenariats avec des collèges, des universités ou le secteur privé pour que le volontariat fasse partie intégrante des programmes ou des activités annexes peut renforcer l’intérêt et accroître la diversité au sein des groupes de volontaires.

Une demande accrue de soutien découlant d’une arrivée massive de migrants peut mettre le personnel, les équipements, etc. à rude épreuve. Il est difficile de renforcer en permanence les capacités du personnel, de disposer d’équipements toujours à jour, etc.

Il est extrêmement important de disposer de procédures opérationnelles normalisées, de former le personnel, de prévoir les interventions d’urgence et d’assurer une bonne coordination entre les différents départements internes, ainsi qu’avec les partenaires externes.

Certaines Sociétés nationales évitent de mener trop ouvertement des activités de plaidoyer par crainte d’être perçues comme étant en conflit ouvert avec le gouvernement.

Un soutien minimal de la part de la Fédération internationale ou d’une Société nationale sœur peut parfois aider une Société nationale à trouver des méthodes de plaidoyer constructives.

Malgré des positions politiques affirmées, certains gouvernements reconnaissent la valeur d’une approche fondée sur les faits en matière de plaidoyer, qu’ils voient comme un moyen de se tenir informés de la situation.

Une approche collaborative avec les acteurs du secteur et les départements gouvernementaux compétents est la clé du changement.

Il peut être utile de mettre à profit le potentiel de la marque Croix-Rouge/Croissant-Rouge pour plaider en faveur du changement.

Combiner des éléments de preuve du problème humanitaire à une solution ciblée constitue une stratégie efficace.

La collecte d’éléments probants et le plaidoyer devraient faire partie intégrante des programmes, et des ressources humaines devraient y être affectées à tous les niveaux.

Les services doivent être adaptés à la situation des migrants et aux dynamiques de la communauté.

Collaborer avec les prestataires qui sont disposés à adapter leurs services aux migrants en fonction des besoins et des dynamiques des communautés concernées.

Il est difficile d’assurer le financement durable des initiatives.

Pas d’enseignement tiré dans le cadre de l’étude.

Dans certains contextes, il est difficile de fournir des informations complètes aux migrants du fait du risque d’être perçu comme encourageant/dissuadant la migration. La nuance est fine entre les informations qui peuvent être fournies / ne peuvent pas être fournies. Cela peut porter atteinte à la confiance des migrants dans le prestataire de services.

Pas d’enseignement tiré dans le cadre de l’étude.

La réussite des pratiques intelligentes repose sur la mise en place de plusieurs éléments facilitateurs.

Pour pouvoir efficacement mettre en œuvre des pratiques intelligentes, les Sociétés nationales ont besoin d’un ensemble d’éléments facilitateurs. Ces éléments leur permettront de mettre l’accent sur la migration parmi d’autres priorités concurrentes.

Les éléments facilitateurs permettront à une Société nationale, dans un premier temps, de savoir qu’il existe un besoin non satisfait et, dans un deuxième temps, d’être en mesure d’y répondre. Ces éléments sont les suivants : i) capacités humaines, ii) capacités techniques, iii) capital financier, iv) contexte politique favorable et v) contexte social/culturel favorable.

Les Sociétés nationales et leurs partenaires sont nombreux à avoir mis au point des outils de facilitation (outils, systèmes, procédures, etc.) pour renforcer leurs capacités. Le rapport en présente 13 :

  • 4 outils de facilitation devant permettre aux Sociétés nationales de disposer des capacités techniques nécessaires pour déterminer l’existence d’un besoin ;
  • 4 outils de facilitation pour leur permettre de développer leurs capacités humaines de manière à pouvoir répondre au besoin ;
  • 7 outils de facilitation pour leur permettre de renforcer leurs capacités techniques de manière à pouvoir répondre au besoin ;
  • 1 outil de facilitation pour leur permettre d’accroître leurs ressources financières afin de pouvoir répondre au besoin.

Par ailleurs, la Fédération internationale peut aider les Sociétés nationales à effectuer des évaluations nationales ou régionales des besoins en leur apportant un soutien technique ou financier. Elle peut aussi les aider à mettre en place les éléments facilitateurs nécessaires pour répondre aux besoins des migrants. Il peut s’agir par exemple d’adapter des outils ou lignes directrices existants pour qu’ils soient applicables à la migration ; de créer un fonds d’affectation spéciale pour la migration ; ou de jouer un rôle de chef de file à l’échelle mondiale dans le domaine de la migration, en parlant d’une seule voix. On trouvera plus de détails sur la question au chapitre intitulé « Facteurs de réussite ».